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Une ruelle verte cohérente, c'est possible!

L’avènement des ruelles vertes à Montréal démontre l’intérêt grandissant des citoyens pour un environnement plus agréable et plus végétal. Le projet, mené par un désir de réappropriation de l’espace urbain pour en faire un lieu agréable et sécuritaire, s’éloigne parfois de ses objectifs premiers. On peut observer certaines incohérences dans les ruelles vertes déjà en place et il serait intéressant de s’en inspirer afin de participer à l’élaboration collaborative de ruelles vertes encore mieux adaptées à l’environnement montréalais. Une ruelle verte efficace vise avant tout la conservation de la biodiversité urbaine ainsi que la lutte aux îlots de chaleur.

http://english.artphodium.com/montreal-back-alleys/

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J’encourage les citoyens à se regrouper et à organiser des activités visant à resserrer le tissu social et à améliorer la vie de quartier. Toutefois, il ne faut pas oublier que le but premier d’une ruelle verte est d’être VERTE. Pas grise et bétonnée. Ainsi, si le but des citoyens est uniquement de se rassembler et d'organiser des activités sociales, mais qu’ils utilisent l'augmentation de la biodiversité et la lutte aux îlots de chaleur comme prétexte, il y a incohérence. Pour mettre sur pied une ruelle verte cohérente et efficace écologiquement parlement, les citoyens doivent être prêts à changer leurs habitudes et à innover. Il faut changer le paradigme de la domination du béton et de l’automobiliste maître et roi dans nos villes. Sinon, rien de plus qu'un club social n'est mis sur pied.


Je discuterai donc de mes recommandations pour une ruelle verte durable dans le temps et véritablement utile à la biodiversité urbaine. Je joindrai aussi quelques idées de plans d’aménagement et je resterai disponible pour répondre à d’éventuelles questions.


Les besoins des végétaux


La mauvaise considération des besoins des végétaux et de la faune microscopique du sol est assez courante dans les projets de ruelle verte. Penser qu’on peut créer une ruelle verte uniquement en plantant des vivaces au milieu du chemin est fallacieux. Une biodiversité urbaine n’est pas possible dans un tronçon de terre large de un pied entouré d’asphalte. Les végétaux vivaces et ligneux ont besoin d’espace aérien pour se déployer et d’espace souterrain pour survivre à l’hiver et pouvoir puiser suffisamment d’eau et de nutriments pour survivre aux dures conditions urbaines. Les habitants du sol ont besoin d’un espace où les cycles de décomposition sont possibles, ce qui n'est pas le cas dans un bac. La diminution des îlots de chaleur passe par une imposante surface foliaire (surface occupée par les feuilles d'un ou plusieurs végétaux).


Ici, on peut voir que mettre uniquement des bacs n’augmente pas vraiment la surface foliaire, crée peu d’ombre et n’aide donc pas vraiment à réduire les îlots de chaleur ni à augmenter la biodiversité urbaine. Les populations de microbes ne peuvent pas migrer dans le sol : il est inexistant. Les bacs sont intéressants en complément à d’autres aménagements, mais pas seuls.


Création d’un espace adapté à l’établissement d’un système écologique

Le système écologique urbain dont fera partie les végétaux de la ruelle verte sera fondé sur l’établissement d’une vie microbienne solide dans le sol. Cette étape est très importante car cette vie est peu développée en ville. Le sol est très sensible à la compaction et il est crucial de créer au moins un petit tronçon de terre où le transit automobile est impossible tout en permettant aux citoyens d’accéder à leur stationnement. C’est ce transit qui cause du danger pour les enfants. Ce devrait être le premier enjeu à traiter, car tant que le transit automobile est permis, les enfants et les microbes du sol ne seront jamais en sécurité dans nos ruelles.


Cycles naturels du sol et accessibilité automobile


Pour créer un espace où les cycles naturels peuvent être complétés tout en maintenant l’accessibilité automobile aux citoyens de la ruelle, il suffit d’identifier un tronçon de la ruelle long de 2 ou trois maisons qui ne possède pas de stationnement. On y retirer ensuite l’asphalte tout en gardant un espace pour les piétons et les cyclistes. Ce tronçon aura une double fonction : empêcher le transit automobile et créer un espace réellement intéressant pour la conservation de la biodiversité urbaine (ce sujet sera abordé plus loin).


Ainsi, les droits acquis des citoyens-automobilistes sont maintenus (ils gardent tous accès à leur stationnement), les enfants sont protégés et un couvert végétal dense sera possible. Les seuls perdants sont les automobilistes qui utilisaient la ruelle pour passer d’une rue à l’autre, ce qui est de toute manière illégal.


Si vous avez réellement pour but d’avoir un impact écologiquement positif sur la biodiversité urbaine, il faut se rappeler qu’un changement écologiquement cohérent dans l’aménagement urbain (conçu pour l’automobiliste en tant que principal usager) n’est possible qu’en acceptant de changer certaines habitudes.


Deux idées d’aménagement en opposition


Figure 1 : Vue Google map d'un tronçon de la ruelle dans Villeray. Aucun stationnement n'y est présent. Il est à noter que l’érable Crimson King (feuilles mauves sur la photo) a été coupé.

Pour bien faire valoir mon point, voici deux aménagements possibles du tronçon en rouge. Le premier coupe le transit, crée un espace propice à la récupération des eaux de pluie, augmente la surface foliaire et conserve l’accès des citoyens à leur stationnement. Vous pourrez juger du deuxième aménagement par vous-même, qui est le modèle d’aménagement le plus implanté à l’heure actuelle.

Premier aménagement

Figure 2 Exemple d'aménagement d’arbres, d’arbustes et d’herbacées du tronçon, espace clé d'une ruelle verte cohérente

Figure 3 Exemple d'aménagement avec uniquement des arbres

L’arbre à large couvert végétal crée un large couvent végétal qui climatise l’espace ombragé. Les arbres colonnaires et les arbustes sont des refuges important pour la faune ailée.

Figure 4 Exemple de la ruelle Cartier-Chabot (avec plus d’arbres s.v.p! )

Un tel espace permettrait de créer un aménagement ayant un impact réel sur la faune urbaine, comme les oiseaux et les insectes. Il serait possible d’y installer un hôtel à insectes. Plusieurs arbres ayant été coupés l’été dernier, cet espace vide permettrait de planter un arbre intéressant, comme un chêne rouge ou un chicot du Canada, qui sont des espèces indigènes, et rehausseraient alors la biodiversité du lieu tout en créant de la nourriture pour les petits animaux. De plus, comme ces essences d’arbres sont peu plantées en ville, elles sont moins enclines à y attraper des maladies et sont résistantes à la pollution urbaine. À l'instar du chicot du Canada, le févier a la capacité de nourrir naturellement le sol d’azote, élément indispensable à la croissance des végétaux.

Par ailleurs, une grande surface de terre permet de récupérer l’eau de pluie et d’éviter qu’elle se retrouve aux égouts, ce qui est un désastre écologique urbain. Il faut éviter que l’eau saine de la pluie se retrouve souillée par l’eau sale des égouts.


De plus, de petits conifères (indispensables aux oiseaux) ou des arbres colonnaires pourraient être plantés pour compléter l’aménagement. Ensuite le choix des vivaces va selon votre fantaisie et la quantité de lumière.


Deuxième aménagement



Des bacs ont été déposés sur les côtés avec quelques plates-bandes de vivaces. De cette manière, on conserve le transit automobile, mais on n’augmente pas réellement la biodiversité urbaine et la surface foliaire, ce qui ne contribue aucunement à la lutte aux îlots de chaleur. De plus, l’eau de pluie retourne majoritairement dans les égouts.




Figure 5 Ruelle verte Outremont Figure 6 Ruelle verte coin Brébeuf/ St-Josepf

Je sais que personne ne débute un projet de ruelle verte en se disant : « Nous voulons implanter une ruelle grise avec peu de surface foliaire ». Je veux seulement illustrer comment le refus de changement et le manque de ressources peut transformer un projet innovateur en projet ordinaire et à faible impact.


Conseils pour une ruelle verte luxuriante


Végétaux ligneux : Le meilleur conseil que je peux donner est la plantation de végétaux ligneux en plein sol, c’est-à-dire des arbres et des arbustes. Ils ont plusieurs avantages : leur entretien est moins complexe et demande moins de temps que pour des vivaces, ils produisent une plus grosse surface foliaire (ce qui a un réel impact sur la température ambiante et les îlots de chaleur) et créent des cachettes de choix pour les petits animaux urbains (les minous!!!).


Figure 7 Arbustes = surface foliaire

La plantation d’arbres sur les côtés est aussi une action-clé dans la lutte aux îlots de chaleur. Une plus grande largeur de plate-bande que sur la photo serait conseillée.


Espace automobile : Il pourrait être intéressant de convertir l’asphalte en pavé perméable afin de permettre la croissance d’un couvre sol résistant aux passages automobiles (comme du trèfle), de permettre la récupération de l’eau de pluie par les végétaux ainsi que d’aider la migration des microbes dans les courants d’écoulement de l’eau.


Concilier arbres et automobiles : Comme suggéré dans mon exemple d’aménagement, sélectionner un ou des espaces libres de stationnements permet de créer un îlot de verdure au milieu de la ruelle tout en laissant l’accès des citoyens-automobilistes à leur stationnement.


Entretien moins complexe : Contrairement aux vivaces et aux annuelles, les arbres et arbustes ne requièrent pas ou peu de désherbage. J’ai vu beaucoup de plantations de ruelles vertes mourir les années suivantes car personne ne s’était donné la peine de désherber et de tailler les vivaces. Ainsi, les arbustes sont une bonne alternative et sont plus durables.


Surface foliaire : La clé de la réussite dans la lutte aux îlots de chaleur réside dans la création d’une masse foliaire importante, afin de créer l’évapotranspiration nécessaire à la baisse de température ambiante. Trois hostas dans un coin de ruelle ne vont concrètement rien changer, alors que des arbustes, qui vont croître en hauteur, vont avoir un plus grand impact. La surface foliaire va aussi contribuer à ombrager le sol, ce qui est propice au maintien de la vie microbienne.


Biodiversité urbaine : La faune et la flore urbaine ont besoin d’une variété de micro-écosystèmes. C’est pourquoi il est important de ne pas mettre uniquement des vivaces. Des végétaux à feuilles, des conifères, des plantes grimpantes, des couvre-sols… pourquoi pas un arc en treillis recouvert de vigne au-dessus de la ruelle ?


Potager en bacs : Les bacs de plantation de chaque côté de la ruelle accessible aux automobilistes sont un aménagement bien adapté à la culture de plantes potagères. Concevoir des bacs avec une réserve d’eau permet d’augmenter le rendement et les chances de réussite de la culture.


Vraie ruelle verte : Enfin, pour les citoyens vraiment innovateurs et acteurs de changement, le mieux serait le retrait total de l’asphalte au profit d’une épaisse couche de terre, de couvre sols, d’arbustes et d’arbres. C’est l’alternative la plus intéressante, car elle permet littéralement d’implanter un verger urbain, avec des arbres à noix, à fruits, des arbustes à baies, le tout vivace et facile d’entretien. Ici, la mission d’augmentation de la biodiversité, de lutte aux îlots de chaleur, de récupération des eaux de pluies et de création d’un environnement sain pour les citoyens est accomplie !

Figure 8 Ruelle Verte entre la 30e et la 31e avenues, entre Bélanger et Bellechasse


En résumé


Je réitère qu’il est impératif de réserver un espace où le transit automobile est impossible afin de créer un endroit intéressant pour la biodiversité urbaine. Je réitère aussi qu’il est possible de bloquer le transit automobile dans la ruelle tout en maintenant l’accès des citoyens à leurs stationnements. La clé d’une ruelle verte réside dans la couverture foliaire, possible seulement avec la plantation de plusieurs arbres et arbustes. IL FAUT CRÉER DE L’OMBRE PAR UN FEUILLAGE DENSE EN HAUTEUR. Pour qu’une ruelle verte prenne tout son sens, on doit voir plus de vert que de gris. Il faut penser en hauteur !


Je comprends qu’un tel projet est complexe à implanter et je salue le dévouement de tous les citoyens s’étant impliqués dans une ruelle verte. J’espère que j’ai su vous apporter un point de vue extérieur et vous donner les outils pour aller encore plus loin. J’espère aussi avoir donné des idées pour les implantations prévues pour l’année prochaine. Un écosystème prend plusieurs années à concevoir et à implanter, et il est normal que la ruelle ne soit pas luxuriante la première année. Prenez le temps cet hiver de vous asseoir ensemble et de reconsidérer les objectifs et les moyens mis en place pour les atteindre. C’est un magnifique projet qui demande réflexion et planification. Pour tout besoin de consultation, de conception ou d’aide pour la mise en place ou l’entretien d’une ruelle verte, n’hésitez-pas à prendre contact avec moi (voir volet CONTACT en haut à droite de la page).


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